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Prix de transfert : le juge de l’impôt persiste et signe quant à la référence automatique à la médiane des panels des comparables.

Dans une affaire portée devant la CAA de Lyon par notre cabinet, le juge de l’impôt a réitéré son attachement à la médiane d’un intervalle de pleine concurrence pour apprécier un transfert indirect de bénéfice. En l’espèce, la marge de la société tombait en-deçà du premier quartile d’un intervalle formé d’une trentaine de références. Il n’en fallait pas davantage pour que l’administration considère qu’une anomalie sur le terrain des prix de transfert affectait la rentabilité de la société et corrélativement, rectifie sa marge nette à hauteur de la médiane du panel.
Le TA de Lyon avait validé cette approche, en reprenant quasi textuellement le dispositif de l’arrêt GE Medical system et en considérant que « Dans les circonstances de l’espèce, la médiane […], qui permet de limiter les marges d’approximation par rapport à un point se situant à l’une ou l’autre des limites extrêmes de cet intervalle, doit être regardée comme le point de l’intervalle qui reflète le mieux les faits et les circonstances des transactions concernées » (TA Lyon, 22 juin 2021, N°1909917 et 1910206).

Ce considérant continue de nous laisser pantois, tant ces deux décisions brillent par l’absence d’explications quant aux « faits et les circonstances » apparemment si exceptionnels qu’ils justifient que l’administration estime automatiquement que le contribuable doit nécessairement dégager une marge plus élevée que la moitié des entreprises pourtant réputées comparables. Nous avons donc expressément demandé à la CAA de Lyon de prendre une position ferme et explicite sur ce sujet, tant dans nos écrits que lors de l’audience, afin d’apporter la clarté nécessaire pour assurer la sécurité juridique et fiscale des contribuables. La CAA de Lyon relève cependant que « il résulte de l’instruction que les marges nettes dégagées sur les courants d’affaires avec les sociétés X et Y se sont révélées non seulement inférieures à la plus basse des données de l’intervalle de pleine concurrence, mais aussi aux minimales « extrêmes » de l’échantillon constatées. De son côté, en se bornant à faire valoir que les marges constitutives des premiers quartiles viennent déjà la placer au-dessus de six sociétés des deux panels pour 2010 et 2011, et alors qu’il ne résulte pas de l’instruction que l’administration aurait fait une application automatique et dénuée de toute appréciation des circonstances des transactions concernées, de la médiane de l’intervalle interquartile, la requérante ne justifie, quant à elle, d’aucune circonstance spécifique permettant d’établir que l’administration, compte tenu des transactions en litige, aurait dû s’écarter de cette marge médiane ».

  • Nous déduisons de cette décision les éléments suivants :

    L’administration est confortée dans la référence automatique à la médiane des panels de pleine concurrence, dès lors que la rémunération du contribuable s’en écarte.
  • Il revient au contribuable d’apporter tout éclairage factuel, statistique, économique ou autre, permettant d’établir que l’administration, compte tenu des transactions en litige, aurait dû s’écarter de cette médiane. En pratique, cela revient à renverser la charge de la preuve sur le contribuable, en le forçant du reste à produire une analyse très subjective.

Le considérant de la Cour semble cependant contenir un indice positif : si la marge du contribuable tombe déjà dans l’intervalle (interquartile) de pleine concurrence, le dispositif pourrait être inversé, car les fameux « faits et circonstances » seraient différents. En effet, c’est parce la marge tombait hors de l’intervalle, que la Cour a dû retenir une cible.

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